Jacques Witkowski ne restera finalement pas longtemps à Strasbourg. Nommé préfet du Bas-Rhin et de la région Grand Est en octobre 2024, il quitte déjà ses fonctions après à peine un an de présence. Direction : Marseille et la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, où l’État lui confie une mission prioritaire de lutte contre le narcotrafic, dans un contexte explosif marqué par l’assassinat récent de Mehdi Kessaci.
Ce départ éclair n’est pas anodin. Witkowski, ancien préfet de Seine-Saint-Denis, avait été choisi pour succéder à Josiane Chevalier avec une réputation de « préfet de poigne« . Son passage à Strasbourg a été marqué par des initiatives controversées, notamment l’envoi de courriers menaçants aux familles de mineurs interpellés lors de violences urbaines. Une méthode musclée qui avait fait grincer des dents.
Mais face à l’urgence marseillaise et à sa proximité avec l’ancien ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, Witkowski a été mobilisé pour une mission jugée stratégique par l’État. Strasbourg passe au second plan.
Amaury de Saint-Quentin : un profil politique qui détonne
Le remplaçant est tout sauf un inconnu du sérail. Amaury de Saint-Quentin, 64 ans, a été nommé préfet du Bas-Rhin et du Grand Est lors du conseil des ministres du 19 novembre 2025. Il arrive tout droit de Bretagne, où il occupait depuis octobre 2024 le poste de préfet d’Ille-et-Vilaine.
Mais ce qui marque, c’est son parcours : ancien cadre du RPR puis de l’UMP, il a collaboré avec des figures de la droite française comme Édouard Balladur, Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac. Une carrière à dominante politique, rare chez les préfets actuels. Entre 2013 et 2015, il a même dirigé l’Agence de santé de Haute-Normandie, une expérience dans la gestion de crise sanitaire qui pourrait peser dans ses futures décisions.
Saint-Quentin est également connu pour son intérêt marqué pour les technologies de surveillance, notamment les drones. Un détail qui pourrait influencer sa gestion de la sécurité à Strasbourg, notamment lors d’événements sensibles comme le marché de Noël.

Un timing politique et sécuritaire calculé
Cette nomination intervient à un moment stratégique. Le marché de Noël de Strasbourg, événement majeur du territoire et cible potentielle d’enjeux sécuritaires, nécessite une présence préfectorale forte et expérimentée. L’arrivée rapide de Saint-Quentin vise justement à assurer cette continuité administrative et opérationnelle.
Mais au-delà du calendrier, ce changement révèle aussi les priorités sécuritaires de l’État : renforcer Marseille face au narcotrafic, tout en plaçant à Strasbourg un homme au profil politique marqué, capable de dialoguer avec les élus locaux dans un contexte où les relations entre la préfecture et la ville peuvent parfois être tendues.

Ce que ce changement dit de Strasbourg
Le passage express de Witkowski et l’arrivée de Saint-Quentin posent question. Strasbourg est-elle devenue une simple étape dans une carrière préfectorale ? Ou le territoire mérite-t-il un préfet qui s’inscrit dans la durée, capable de comprendre les enjeux locaux au-delà des grands événements et des dispositifs sécuritaires ?
Avec Amaury de Saint-Quentin, la ville accueille un homme d’expérience, mais aussi un profil politique qui pourrait transformer les relations entre l’État et le territoire. Reste à savoir quelle empreinte il laissera dans le Bas-Rhin.
