À 29 ans, Cem Yoldas bouscule les codes de la politique strasbourgeoise. Éducateur en prévention spécialisée dans un quartier populaire, porte-parole national de la Jeune Garde Antifasciste, il vient d’être désigné tête de liste de « Strasbourg c’est nous » pour les municipales de mars 2026. Une candidature qui assume ouvertement la rupture avec la municipalité écologiste de Jeanne Barseghian.
Lors d’une conférence de presse tenue le 7 novembre au Café Libro de la Maison de l’Amérique latine, le jeune candidat a présenté un programme social ambitieux : gratuité totale des transports en commun, restaurants municipaux solidaires, plafonnement des loyers, désarmement de la police municipale. « Nous ne venons pas pour faire de la figuration« , prévient-il. « Notre objectif est d’avoir des élus au conseil municipal.«
De la rue Vauban au conseil municipal : un engagement antifasciste
L’engagement politique de Cem Yoldas trouve ses racines dans la lutte contre l’extrême droite strasbourgeoise. En 2017, l’ouverture d’un local du Bastion social rue Vauban, suivie d’agressions racistes et homophobes dans le quartier de l’Esplanade, le pousse à rejoindre des collectifs antifascistes puis la Jeune Garde Strasbourg. « Personne ne croyait en nos chances de vaincre l’extrême-droite, eh bien on l’a fait« , revendique-t-il, évoquant la fermeture du local et le recul de la violence d’extrême droite dans la ville.
Cette expérience militante structure aujourd’hui sa vision politique. Face aux attaques de Virginie Joron qui le qualifie de « menace communautariste« , il répond fermement : « L’extrême-droite ne dictera pas qui est Alsacien ou non, qui est Strasbourgeois ou non.«

Une charge frontale contre le bilan de Jeanne Barseghian
Le candidat accumule les reproches contre la maire écologiste actuelle, qu’il accuse d’avoir « fauté politiquement et moralement à de nombreuses reprises« . Il lui reproche d’avoir participé à « la cabale islamophobe contre le rappeur Médine« , d’avoir « nié avoir connaissance des accusations visant M. Polesi« , et d’avoir « rendu des terrains impraticables afin d’empêcher l’installation de campements de personnes à la rue« .
Cem Yoldas dénonce également le refus de la municipalité « d’en finir avec le jumelage de la honte entre Strasbourg et la ville israélienne de Ramat Gan« . Surtout, il pointe un échec social majeur : « Strasbourg reste l’une des villes en France avec le taux de pauvreté le plus élevé. »
Le constat dressé est sévère : des milliers de Strasbourgeois subissent selon lui « un système qui s’effondre avec des loyers toujours plus chers et une crise du logement qui expulse les plus précaires hors de la ville, une inflation qui étrangle les familles populaires, des politiques d’aménagement urbain qui accélèrent la gentrification, détruisent les liens de quartier et transforment Strasbourg en vitrine. »
Un programme social radical pour les quartiers populaires
Face à cette situation, « Strasbourg c’est nous » propose un programme ambitieux centré sur les classes populaires. Les mesures annoncées incluent : la gratuité totale des transports en commun et des cantines scolaires, l’installation de restaurants municipaux solidaires, le développement d’épiceries solidaires, l’ouverture de nouvelles crèches.
Le candidat prévoit également un soutien financier ambitieux aux réseaux associatifs, notamment pour les associations des droits des femmes, et un « maillage territorial égalitaire des espaces associatifs, garantissant des locaux et des relais dans l’ensemble des quartiers populaires« .
Sur le logement, point central du programme, Cem Yoldas propose un plan d’urgence social : encadrement strict du réseau Airbnb, interdiction de la construction de privé à la place du social, plafonnement des loyers, baisse des loyers des bailleurs sociaux municipaux, rénovations thermiques, réintégration de concierges dans les immeubles collectifs, et réquisition des logements vacants.

Désarmement de la police et justice sociale
Le programme prévoit le « désarmement de la police municipale et la transformation de son rôle en police de proximité« , ainsi que « la mise en place de pôles d’accueil et d’accompagnement des victimes de violences policières » – une mesure inédite dans le paysage politique strasbourgeois.
La liste propose également une « végétalisation égalitaire entre le centre-ville et les quartiers populaires« , refusant une écologie à deux vitesses, et la fin définitive du jumelage entre Strasbourg et Ramat Gan.
Une coalition de gauche radicale inspirée par New York
« Strasbourg c’est nous » est soutenue par le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) – l’Anticapitaliste 67, l’Union pour la reconstruction communiste (URC) – section Alsace, Yeni Demokratik Gençlik (Nouvelle jeunesse démocratique) – Strasbourg, « D’ailleurs nous sommes d’ici » (DNSI) – 67, et le Comité de soutien à la Jeune Garde Strasbourg.
Le candidat cite en source d’inspiration la victoire de Zohran Mamdani à l’élection municipale de New York, y voyant la preuve que « l’avenir est dans une gauche populaire, multiculturelle, internationaliste et profondément antiraciste« .
« Nous sommes la seule force politique qui incarne la rupture avec les logiques capitalistes et fascisantes« , insiste Cem Yoldas. « Nous sommes la seule liste à gauche qui assume la rupture avec le bilan de Mme Barseghian. Nous sommes la seule liste qui n’est pas portée par des professionnels de la politique.«
Le candidat conclut sa déclaration sur une citation de Thomas Sankara : « Nous devons choisir entre le champagne pour quelques-uns et l’eau potable pour tous. » Un message qui résume l’ambition affichée : « Nous le disons aux forces de l’argent : Strasbourg n’est pas leur terrain de jeu, Strasbourg n’est pas à vendre. »
Face aux listes de Jeanne Barseghian (EELV), Catherine Trautmann (PS), et à une droite en ordre dispersé, cette candidature de gauche radicale, qui se définit comme « la seule force à gauche qui ne compte pas seulement sur elle-même mais qui souhaite être un appui pour les mobilisations sociales« , promet d’animer intensément le débat municipal strasbourgeois jusqu’en mars 2026.
