Moins d’un mois. C’est le temps qu’aura duré le gouvernement de Sébastien Lecornu à Matignon. Nommé le 9 septembre 2025, le Premier ministre a remis sa démission ce lundi 6 octobre, acceptée immédiatement par Emmanuel Macron. Un mandat éclair de 27 jours qui fait de Lecornu le Premier ministre le plus éphémère de la Ve République, battant tous les records d’instabilité gouvernementale.

La nouvelle a provoqué un séisme politique immédiat : la Bourse de Paris a chuté de près de 2% dans la foulée, tandis que l’opposition, de Jean-Luc Mélenchon à Jordan Bardella, réclamait la destitution du président ou une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale. Lecornu devait présenter sa déclaration de politique générale le lendemain, mardi 7 octobre. Il ne le fera jamais.

Cinq Premiers ministres en trois ans : l’instabilité devient la norme

Depuis le début du second mandat d’Emmanuel Macron en mai 2022, la France a connu une valse inédite de chefs de gouvernement. Élisabeth Borne ouvre le bal le 16 mai 2022, avant de démissionner en décembre 2023. Gabriel Attal, 34 ans, lui succède en janvier 2024 et devient le plus jeune Premier ministre de la Ve République. Son passage est bref : il démissionne en septembre 2024.

C’est alors au tour de Michel Barnier, 73 ans à sa nomination le 5 septembre 2024, de prendre les rênes. Avec lui, c’est le doyen de Matignon qui s’installe, à la tête d’un gouvernement minoritaire mêlant Ensemble et Les Républicains. Mais face aux tensions parlementaires, son gouvernement est renversé par une motion de censure le 13 décembre 2024, après seulement 99 jours d’exercice.

François Bayrou est nommé le jour même pour tenter de stabiliser la situation avec un gouvernement de coalition élargie. Pourtant, moins de dix mois plus tard, c’est Sébastien Lecornu qui est appelé à Matignon, le 9 septembre 2025. Sa nomination suscite immédiatement critiques et réticences, y compris au sein de la majorité.

Mais le gouvernement Lecornu ne tiendra pas. Submergé par les critiques internes et externes, miné par une composition perçue comme un simple carrousel des mêmes têtes usées, il s’effondre avant même d’avoir pu présenter sa feuille de route devant les députés.

Un record qui interroge : que dit cette crise de la République ?

Cinq Premiers ministres en trois ans. Ce rythme effréné illustre l’ampleur de la crise politique que traverse la France. Chaque changement de tête à Matignon reflète une difficulté croissante à construire des majorités stables à l’Assemblée nationale, à fédérer les forces politiques, à incarner une direction claire.

L’éphémère gouvernement Lecornu symbolise cette impasse : un exécutif fragilisé, une coalition qui peine à tenir, des ministres recyclés à l’infini (Le Maire, Dati, Woerth, Valls, Borne, Retailleau…), une opposition virulente, et une opinion publique de plus en plus désabusée. Emmanuel Macron doit désormais nommer un sixième Premier ministre et recomposer, encore une fois, un gouvernement capable de gouverner dans la durée.

À Strasbourg comme ailleurs en France, cette instabilité suscite interrogations et inquiétudes. Comment mener des réformes, voter un budget, construire des politiques publiques durables dans un tel contexte ? La question reste entière, et l’horizon politique, plus que jamais incertain.