En 1348-1349, Strasbourg, ville libre impériale située sur les rives de l’Ill et centre commercial majeur d’Alsace, est frappée par la peste noire. La peur et la panique alimentent des rumeurs infondées : les juifs du quartier de la Judengasse (actuel rue des Juifs, près de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg) sont accusés d’empoisonner les puits. La haine anti-juive s’exacerbe, comme dans d’autres villes d’Alsace, notamment Colmar, Haguenau et Saverne.


🔹 Le pogrom du 14 février 1349 : tragédie dans le quartier juif

Le 14 février 1349, la révolte des corporations de métiers renverse les autorités municipales. Le quartier juif de Strasbourg, alors situé autour de l’actuelle rue des Juifs et place de l’Ancienne Synagogue, est encerclé :

  • Entre 1 000 et 2 000 juifs, hommes, femmes et enfants, sont brûlés vifs au cimetière juif proche de la Petite France.
  • Des enfants sont baptisés de force avant d’être jetés dans le bûcher.
  • Les biens des victimes – maisons, commerces, ateliers sur la Grand’Rue et créances – sont spoliés et redistribués entre citoyens et autorités.

Ce massacre est connu localement sous le nom de Judenbrand et marque profondément l’histoire du centre-ville historique de Strasbourg.


🔹 Conséquences économiques et sociales

La disparition de la communauté juive provoque un choc économique : les réseaux financiers et commerciaux autour de la Grand’Rue, du Ponts Couverts et du quartier de la Petite France s’effondrent. La ville impose un bannissement de plusieurs siècles, interdisant tout retour de juifs avant la fin du XIVᵉ siècle.

La peste noire continue malgré ce massacre, infirmant les accusations portées contre la communauté juive.


🔹 Le pardon officiel de Charles IV : 12 septembre 1349

Pour rétablir l’ordre et stabiliser le commerce strasbourgeois, l’empereur Charles IV signe un pardon officiel le 12 septembre 1349 :

  • Les citoyens de Strasbourg sont amnistés pour le massacre et la spoliation des biens juifs.
  • Aucun responsable ne sera poursuivi ou sanctionné.
  • L’objectif est de pacifier la ville et de protéger ses élites tout en sécurisant son rôle de centre commercial européen.

Cette date reste un tournant majeur dans l’histoire de la vieille ville de Strasbourg.

Le 12 septembre 1349 symbolise à Strasbourg la mémoire tragique du Judenbrand et l’amnistie impériale de Charles IV, reflétant la complexité des enjeux entre peur, haine et intérêts économiques dans le centre historique de Strasbourg.