De la place de la République à Paris jusqu’à la place Kléber à Strasbourg, ils marchaient, nuit et jour, parfois jusqu’à l’épuisement. Pendant plus d’un demi-siècle, la course Paris-Strasbourg à la marche a fait vibrer les villages de l’Est, forgeant l’une des plus grandes légendes du sport d’endurance. Retour sur cette épreuve mythique qui a marqué l’histoire sportive de Strasbourg et du Bas-Rhin.
🏁 Une course d’un autre temps… jusqu’au cœur de Strasbourg
Créée en 1926 par Émile Anthoine, la Paris-Strasbourg à la marche est restée pendant des décennies la course de marche athlétique la plus longue au monde. Plus de 500 kilomètres à parcourir sans étapes obligatoires, sur les routes de l’Est de la France, entre Paris et Strasbourg. L’arrivée se tenait place Kléber, en plein cœur de la capitale alsacienne.
Les marcheurs devaient avancer sans relâche, jour et nuit, parfois plus de 80 heures d’affilée. Les pauses, limitées à quelques heures, exigeaient une gestion mentale et physique extrême. Jusqu’à 60 % des participants abandonnaient en cours de route.

👟 Un défi d’endurance hors normes
Par sa durée et sa difficulté, la course était considérée comme un Everest de la marche. En 1931, le Français Louis Godart parcourait les 508 km en 67 h 54 min… après seulement 4 heures de sommeil.
Certains concurrents rapportaient avoir vu des marcheurs dormir en marchant. Les accompagnateurs à vélo, souvent des proches, suivaient leur champion pour les ravitailler, les motiver… ou les retenir de tomber. L’ambiance était unique : à chaque traversée de village, les habitants sortaient encourager les marcheurs, les enfants faisaient quelques foulées à leurs côtés, et des fanfares improvisées surgissaient à l’entrée des bourgs.
📜 Une histoire jalonnée d’interruptions… et de renaissances
- 1926-1937 : premières éditions annuelles, avec des vainqueurs comme Jean Linder (Suisse) ou Louis Godart (France).
- 1949-1959 : relance d’après-guerre, notamment dominée par Gilbert Roger (6 victoires).
- 1970-1979 : dernière grande décennie, marquée par Josy Simon (Luxembourg).
- 1981 : la course est remplacée par Paris-Colmar, toujours en activité aujourd’hui, avec une arrivée désormais à Colmar (Haut-Rhin) depuis 2015.
Ces mutations reflètent les évolutions logistiques et sécuritaires, mais aussi un certain déclin médiatique du format.

⭐ Une mémoire vivace en Alsace
Si Strasbourg a longtemps été le point d’arrivée symbolique, c’est toute l’Alsace qui vibrait à l’approche de la course. Wissembourg, Saverne, Haguenau, Brumath, puis Strasbourg accueillaient les derniers kilomètres de l’épreuve, et les habitants en faisaient un événement populaire. Les archives vidéo et les témoignages locaux, comme ceux conservés par Image’Est, permettent encore de ressentir l’intensité de ces moments.
Aujourd’hui, la course Paris-Colmar, organisée avec le soutien de collectivités alsaciennes comme la ville de Colmar et le Conseil départemental du Haut-Rhin, perpétue cet héritage avec des épreuves sélectives, moins longues mais toujours exigeantes.
