Des chercheurs de l’Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS – CNRS/Université de Strasbourg) ont mis au point une nouvelle méthode théorique qui pourrait transformer la manière dont les matériaux supraconducteurs sont conçus. En collaboration avec l’Institut Quantique de l’Université de Sherbrooke (Canada) et l’Université Rutgers (États-Unis), ils proposent un cadre prédictif inédit, basé uniquement sur la structure atomique et la composition chimique des matériaux.
L’étude, publiée dans la revue Physical Review X, ouvre la voie à une compréhension fine de la supraconductivité dite « à haute température« , un phénomène encore mal expliqué malgré des décennies de recherche.
Comprendre la supraconductivité à haute température
La supraconductivité est un état de la matière dans lequel les électrons circulent sans résistance ni perte d’énergie. Si les mécanismes de la supraconductivité à très basse température sont bien compris dans des métaux comme l’aluminium, ce n’est pas le cas pour les matériaux dits « à haute température » – notamment les cuprates, des oxydes de cuivre complexes.
Jusqu’à présent, les modèles théoriques peinaient à prédire avec précision le comportement de ces matériaux. La nouvelle méthode mise au point par l’équipe franco-canadienne-américaine permet de combler ce vide.

Une méthode prédictive testée sur deux familles de cuprates
Les chercheurs ont testé leur modèle sur deux familles de cuprates multicouches complexes : HgBa₂Caₙ₋₁CuₙO₂ₙ₊₂ et Ca₁₊ₙCuₙO₂ₙCl₂ (pour n allant de 1 à 5). Résultat : avec un seul paramètre fixe, ils sont parvenus à reproduire des observations expérimentales clés, notamment la performance optimale des composés à trois couches (n = 3).
Ce phénomène s’expliquerait par deux effets : la contribution bénéfique des couches internes de CuO₂ à la supraconductivité, contrebalancée par une répartition inégale des électrons qui tend à défavoriser ces mêmes couches. Cette double lecture permet de dépasser les approches antérieures, souvent limitées à des descriptions qualitatives.

Une brique vers les supraconducteurs du futur
Cette avancée théorique offre une capacité prédictive puissante pour identifier de nouveaux matériaux à fort potentiel supraconducteur. À terme, elle pourrait contribuer à l’un des objectifs les plus ambitieux de la physique des matériaux : atteindre la supraconductivité à température ambiante, avec des applications majeures dans les domaines de l’énergie, du transport ou encore de l’informatique quantique.
La contribution de l’IPCMS confirme le rôle central de Strasbourg dans la recherche internationale sur les matériaux quantiques.
Lire l’étude complète sur Physical Review X
