C’est dans une ambiance feutrée que le Parti Socialiste de Strasbourg a présenté sa nouvelle feuille de route. Un document de neuf pages, adopté jeudi 24 avril par 86 % des militants socialistes, a été dévoilé à la presse par Catherine Trautmann, Mathieu Cahn et Thierry Sother.

Toutefois, certaines rédactions locales, dont StrasInfo.fr, n’ont pas eu accès à cet échange malgré plusieurs sollicitations, renforçant le sentiment d’un événement réservé à un cercle restreint d’habitués.

Un positionnement sans ambiguïté

Selon Les Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA), Mathieu Cahn a posé une ligne claire : « Le PS strasbourgeois ne discutera pas avec la droite, ni avec LFI ».
Une position qui a immédiatement fait réagir sur les réseaux sociaux. Guy, un habitant engagé, a ironisé sur Facebook : « Donc ils vont discuter avec eux-mêmes. On avait un peu l’habitude de ce monologue au PS local ».

La situation paraît d’autant plus paradoxale que Thierry Sother, aujourd’hui député, a été élu sous la bannière de la NFP, coalition comprenant notamment LFI. Depuis, son refus de voter la motion de censure contre le gouvernement Bayrou a été vécu comme une trahison par nombre de ses électeurs.
Le 16 janvier 2025, Sother justifiait sa position sur X :
« Nous restons dans le NFP et dans l’opposition à Bayrou. Mais plutôt que de risquer la politique du pire, les socialistes arrachent des concessions allant dans le sens de notre programme : sur les retraites, l’école ou encore l’hôpital. »

Des déclarations jugées insuffisantes par de nombreux militants et électeurs. Bérénice lui a répondu sur X : « C’est vraiment maigre, indigent, au regard de ce qu’est ce gouvernement illégitime fascisant, avec Retailleau, Darmanin et Borne à la manœuvre ! » Tandis que Benjamin pointait l’incohérence de la stratégie : « Super, vous laissez Retailleau et Darmanin en place. Grosse victoire ».

Une défiance croissante envers les figures locales

À Strasbourg, la nouvelle feuille de route du PS ne fait que raviver un sentiment de lassitude face à des figures politiques jugées vieillissantes et déconnectées. Catherine Trautmann, présente au conseil municipal dès 1983, incarne pour beaucoup une politique « à l’ancienne« , marquée par des logiques d’entre-soi et perçue comme éloignée des réalités quotidiennes des Strasbourgeois. Longtemps maire de Strasbourg et ministre, elle reste associée à une époque révolue pour de nombreux habitants, qui peinent à voir en elle une réponse aux défis actuels de la ville.

Mathieu Cahn, quant à lui, porte encore les stigmates de son retrait lors des dernières municipales avec  » L’affaire des photos érotiques d’étudiantes  » comme l’explique France 3 Grand Est, et n’a pas regagné la confiance populaire.

Quant à Thierry Sother, il est régulièrement critiqué pour son manque d’ancrage local. Avant son élection, il intervenait davantage sur Mulhouse que sur Strasbourg. Aujourd’hui, ses prises de parole sur les réseaux sociaux peinent à convaincre, tant elles paraissent éloignées des préoccupations locales.

Quel avenir pour le PS strasbourgeois ?

À l’approche des municipales de 2026, le Parti Socialiste se retrouve face à ses contradictions.
Refusant toute alliance avec la droite comme avec LFI, son isolement semble inévitable. Certains observateurs s’interrogent sur un éventuel rapprochement avec des centristes, à l’image du choix de Thierry Sother de ne pas voter la motion de censure contre le gouvernement Bayrou.

Plus largement, beaucoup redoutent une répétition du scénario des dernières élections municipales : l’irruption, dans les quartiers populaires, de militants socialistes souvent invisibles durant tout le mandat.
Ces militants, liés à des associations vivant de subventions publiques, sont perçus par de nombreux habitants comme des relais politiques déconnectés des réalités du terrain.
À Strasbourg, ces pratiques sont désormais largement dénoncées : dans les QPV (quartiers prioritaires de la ville), nombreux sont ceux qui se disent lassés de se faire « instrumentaliser » à chaque échéance électorale.

« Pendant des décennies, ils ont disparu entre deux scrutins. Aujourd’hui, les Strasbourgeois ne sont plus dupes », confie un habitant du quartier de la Meinau.

Le Parti Socialiste parviendra-t-il à inverser cette dynamique ? À moins d’un profond renouvellement, la défiance pourrait bien l’emporter.