Les manifestations hebdomadaires en soutien à la cause palestinienne organisées dans le centre-ville de Strasbourg continuent de susciter un vif débat dans la classe politique locale. Ce samedi 12 avril, un nouvel épisode de tension est venu raviver la polémique autour de ces rassemblements.

Un incident déclencheur et des réactions en chaîne

Tout est parti d’un geste : selon plusieurs vidéos relayées sur les réseaux sociaux, un homme aurait adressé des doigts d’honneur à des manifestantes. Ce geste a rapidement fait monter la tension sur place. L’individu aurait alors trouvé refuge dans une boulangerie, tandis que la police intervenait pour prévenir tout débordement.

Dans une publication Facebook très partagée, Yazid Knibiehly, président du CREPS et responsable des jeunes Républicains, a tenu à rappeler que « la boulangerie n’a à aucun moment été visée pour des raisons religieuses », tout en condamnant fermement « la volonté de certains manifestants d’en découdre physiquement avec l’auteur du geste – un comportement grave et inacceptable ».

Mais pour lui, le véritable problème est ailleurs : « Chaque samedi, Strasbourg devient le théâtre de manifestations où la cause palestinienne sert de prétexte à une haine obsessionnelle d’Israël, avec une violence verbale – et parfois physique – qui ne cesse de s’intensifier », écrit-il.

Dans un commentaire posté en réponse à sa propre publication, il ajoute que « deux enseignes ont été prises pour cible ce samedi », sans en révéler les noms, par respect pour la volonté des commerçants concernés de ne pas alimenter la polémique. « Ces manifestations n’ont rien de pacifique », tranche-t-il.

Un appel à la fermeté relayé par Pierre Jakubowicz

Un courrier officiel adressé au préfet par Pierre Jakubowicz, conseiller municipal et co-président du groupe Centristes et Progressistes, vient renforcer cet appel à l’action. Dans cette lettre datée du 14 avril, il alerte sur les conséquences répétées de ces rassemblements pour les habitants et les commerçants du centre-ville.

« La multiplication et l’organisation systématique de manifestations les week-ends au centre-ville de Strasbourg […] vient causer d’importantes perturbations dans le réseau de transports en commun strasbourgeois, et nuire à l’activité économique des commerçants du secteur », écrit-il.

Il appelle à « une réflexion pour concilier la liberté de manifestation avec les droits et libertés du reste de la population de jouir de l’espace public en toute sécurité », notamment en envisageant des parcours alternatifs aux zones très fréquentées ou desservies par le tramway.

Ce courrier a toutefois disparu des réseaux sociaux quelques heures après sa publication. Une suppression qui n’a pas manqué d’interroger certains militants.

Des critiques sévères de la part des Strasbourgeois

Du côté des soutiens aux manifestations, la riposte ne s’est pas fait attendre. Plusieurs figures locales, dont Tahar et Frédéric – militants actifs sur les réseaux sociaux – ont réagi en accusant une partie de l’opposition de parti pris. Tahar évoque ainsi « Il est du camp du CRIF… », tandis que Frédéric regrette que Pierre Jakubowicz ne se soit « pas opposé au génocide commis par Israël ».

Les critiques soulignent également un « deux poids deux mesures » : selon d’autres militants, les élus d’opposition sont très réactifs lorsqu’il s’agit de dénoncer les supposés débordements de manifestations, mais « aucun ne s’est prononcé sur le droit international, ni sur les accusations de génocide à Gaza », ni sur la « libre circulation de Benjamin Netanyahou dans l’union européenne alors qu’un mandat d’arrêt à été émis à son encontre par la Cour pénale internationale ».

Vers une interdiction des rassemblements ?

Alors que les municipales de 2026 approchent, la question de l’interdiction des manifestations pro-palestiniennes dans le centre-ville revient de plus en plus fréquemment dans le débat public local. Yazid Knibiehly n’exclut pas cette option : « Quand les lignes rouges sont franchies, l’interdiction de ces manifestations en centre-ville doit se poser, voire s’imposer ».

Face à cette escalade verbale et politique, la préfecture du Bas-Rhin pourrait être amenée à trancher dans les jours à venir.

Un climat politique sous tension

Depuis le 7 octobre 2024 et la reprise du conflit à Gaza, le climat politique français, et tout particulièrement à Strasbourg, s’est considérablement tendu. Entre les accusations de récupération politique et les craintes pour le vivre-ensemble la capitale européenne semble prise dans un tourbillon dont elle peine à sortir.

Le débat est désormais lancé : jusqu’où ira l’opposition locale pour tenter de mettre fin à ces rassemblements ? Et quelle sera la réponse des autorités face à cette pression croissante ?