Né à Strasbourg le 2 juillet 1906, Hans Albrecht Bethe est l’un des physiciens les plus influents du XXe siècle. Son parcours, marqué par l’exil, la recherche fondamentale et l’engagement éthique, illustre la complexité des liens entre science et société.

Des racines alsaciennes à l’exil

Fils d’Albrecht Bethe, professeur de physiologie à l’université de Strasbourg, Hans Bethe grandit dans un environnement intellectuel stimulant. Après des études en Allemagne, notamment à Francfort puis Munich, il obtient son doctorat en physique théorique en 1928 sous la direction d’Arnold Sommerfeld, l’un des grands noms de la physique moderne.

En 1933, la montée du nazisme et les lois anti-juives poussent Bethe à quitter l’Allemagne. Il s’installe d’abord au Royaume-Uni, puis émigre aux États-Unis en 1935. Il y rejoint l’université Cornell, à Ithaca, dans l’État de New York, où il poursuivra l’essentiel de sa carrière.

Le projet Manhattan : science et responsabilité

En 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, Hans Bethe est recruté par Robert Oppenheimer pour participer au projet Manhattan. Il prend la tête de la division de physique théorique au laboratoire secret de Los Alamos, au Nouveau-Mexique.

Son équipe joue un rôle central dans la conception de la bombe atomique, notamment en travaillant sur la masse critique nécessaire pour déclencher une réaction de fission nucléaire. Le 16 juillet 1945, Bethe assiste à la première explosion atomique dans le désert du Nouveau-Mexique – un moment qui marquera à jamais sa conscience scientifique.

Un savant engagé pour la paix

Après la guerre, Bethe prend position contre le développement de la bombe H, même s’il y participe brièvement pour éviter que le projet ne soit mal dirigé. Rapidement, il devient un fervent défenseur du désarmement nucléaire. Il s’engage publiquement, aux côtés d’Albert Einstein et d’autres scientifiques, pour la limitation des armements et la signature du traité d’interdiction des essais nucléaires atmosphériques en 1963.

Un Nobel pour les étoiles

En 1967, Hans Bethe reçoit le prix Nobel de physique pour ses travaux fondamentaux sur la production d’énergie dans les étoiles. Il a notamment décrit le « cycle de Bethe », un ensemble de réactions thermonucléaires qui expliquent comment les étoiles convertissent l’hydrogène en hélium, libérant ainsi l’énergie qui éclaire notre univers.

Une mémoire strasbourgeoise

Hans Bethe s’éteint le 6 mars 2005 à Ithaca, à l’âge de 98 ans. Son nom reste attaché à des découvertes majeures et à un engagement éthique profond. Pour Strasbourg, sa ville natale, il est bien plus qu’un scientifique de renom : il est un symbole de l’excellence intellectuelle alsacienne, de l’exil forcé et de la responsabilité des chercheurs face aux enjeux du monde.