Le débat s’enflamme sur Facebook suite au vote serré rejetant la demande de retrait d’un partenariat académique
STRASBOURG – Un vote serré au conseil d’administration de Sciences Po Strasbourg a décidé, à 16 voix contre 14, de maintenir le partenariat éducatif et scientifique avec l’Institut Reichman en Israël. Cette décision a immédiatement suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux, notamment à travers un long message de Pernelle Richardot sur sa page Facebook.
Dans sa publication, elle qualifie le vote d’ »éminemment politique » et déplore ce qu’elle nomme une « haine vertueuse » qui, selon elle, « ne se reconnaît jamais comme telle, car elle se drape dans les atours d’une justice instantanée, façonnée par les émotions du moment« . Elle exprime également ses inquiétudes quant à ce qu’elle perçoit comme un « rétrécissement du champ démocratique » et défend l’idée que la démocratie « suppose un espace où coexistent le dissensus, le doute, l’altérité, et parfois même l’inconfort intellectuel« .
La publication a rapidement généré de nombreuses réactions contradictoires, illustrant la polarisation des opinions sur ce sujet sensible.
Des réactions tranchées
Parmi les commentateurs, Arieh Adida a salué la position de Richardot, la qualifiant de « construite et courageuse« . À l’opposé, plusieurs internautes ont vivement contesté son analyse.
Ahmed Faouzi a réagi en évoquant le bilan humain du conflit en cours : « Plus de 15000 enfants palestiniens assassinés par l’armée sioniste d’occupation ! Et si c’était le sien. »
Dans un commentaire plus développé, Hamed Ouanoufi a interpellé directement APR : « Tu parles de haine vertueuse qui se drape dans des postures faussement humanistes. Sans nul doute tu es aveuglée par ton attachement à Israël. Celà t’empêche de voir à quel point ce pays est devenu la pire des entités terroristes. »
Il poursuit en dénonçant ce qu’il considère comme un manque de cohérence politique : « N’est-ce pas l’ADN de la gauche que de lutter contre l’extrême droite, » interroge-t-il, suggérant qu’une élue se réclamant de la gauche socialiste devrait adopter une position plus critique envers le gouvernement israélien actuel. Selon lui, cette position « trahit un véritable manque d’empathie envers les civils palestiniens » que l’élue « invisibilise dans ses prises de position. »
Son message se conclut sur une note personnelle de déception : « Voilà je te le dis sans haine, avec respect tu nous as énormément déçus, blessés, on attendait autre chose de toi. Tu vois les images des enfants, des journalistes assassinés et pourtant tu ne les dénonces pas. » Ces mots traduisent un sentiment partagé par certains militants et sympathisants de gauche qui attendent des prises de position plus fermes de la part de leurs représentants sur ce conflit international.

Une contestation du processus de décision
Le professeur Vincent Dubois a, quant à lui, contesté frontalement l’analyse de Richardot, qualifiant son message de « lamentable tissu de contre-vérités« . Il affirme que le vote s’est fait « au mépris le plus total des arguments factuels présentés par le comité d’étude de ce partenariat« , précisant que ce comité aurait rendu « un dossier de 30 pages et une recommandation unanime de cesser ce partenariat » tout en suggérant de chercher une collaboration avec « une université israélienne digne de ce nom« .
Selon lui, la décision irait à l’encontre des souhaits de « l’essentiel des étudiants et des enseignants de Sciences Po« .
Un débat qui dépasse le cadre universitaire
Cette controverse autour du maintien d’un partenariat académique s’inscrit dans un contexte plus large de tensions et de débats sur les relations universitaires internationales, particulièrement avec les institutions israéliennes depuis le début du conflit à Gaza.
À Strasbourg, ce débat prend une dimension particulière dans une ville où le dialogue interculturel a toujours occupé une place importante. La question dépasse désormais le simple cadre des relations académiques pour toucher à des problématiques plus larges de solidarité internationale, de liberté académique et de positionnement politique des institutions d’enseignement supérieur.
Le vote au conseil d’administration de Sciences Po Strasbourg, s’il a tranché temporairement la question, ne semble pas avoir apaisé les tensions, comme en témoignent les échanges animés sur les réseaux sociaux.
