Alors que Strasbourg venait tout juste de célébrer sa libération en novembre 1944, la ville se retrouve sous une nouvelle menace en janvier 1945. Retour sur les jours critiques où le général de Gaulle refusa catégoriquement d’abandonner Strasbourg, symbole du retour de l’Alsace à la France.
La libération de Strasbourg : un moment d’espoir
Le 23 novembre 1944, la 2ᵉ Division Blindée du général Leclerc entre triomphalement dans Strasbourg, chassant les forces allemandes. Pour les Strasbourgeois, c’est une renaissance. Après des années de domination nazie, la cathédrale arbore de nouveau le drapeau tricolore. Le général Leclerc, fidèle à son serment de Koufra, fait de Strasbourg un symbole du retour de l’Alsace à la mère patrie.
Cependant, cette victoire est rapidement assombrie. En décembre 1944, la situation sur le front de l’Est devient critique. L’armée allemande, bien que affaiblie, prépare une contre-offensive massive pour reprendre pied en Alsace et sauver l’honneur du Reich.

L’opération Nordwind : Strasbourg sous le feu
Dans la nuit du 31 décembre 1944 au 1ᵉʳ janvier 1945, l’Allemagne lance l’opération Nordwind. Cette attaque vise à reprendre plusieurs points stratégiques en Alsace, dont Strasbourg.
Le IIIe Reich mobilise des forces considérables, avec notamment la 25ᵉ Panzergrenadier-Division et des éléments de la 6ᵉ Armée Panzer. Les combats s’intensifient autour de Bitche, Haguenau, et dans le secteur de la forêt de Haguenau, menaçant directement Strasbourg.
Les troupes françaises et alliées, épuisées par la bataille des Ardennes, peinent à contenir l’avancée allemande. Dans les villages environnants comme La Wantzenau ou Hoerdt, des affrontements violents se déroulent, tandis que les habitants de Strasbourg redoutent un retour de l’occupant nazi.

Les pressions d’Eisenhower et le refus de de Gaulle
Face à la progression allemande, le haut commandement allié, dirigé par le général Dwight D. Eisenhower, propose une solution drastique : évacuer Strasbourg pour concentrer les forces alliées sur une ligne plus défendable, au sud de l’Alsace.
Cette proposition provoque une véritable crise politique. Le général de Gaulle, président du Gouvernement provisoire de la République française, s’insurge contre cette idée. Pour lui, Strasbourg ne peut être abandonnée.
De Gaulle convoque une réunion de crise le 2 janvier 1945 à Paris, où il impose son point de vue. Il ordonne au général Jean de Lattre de Tassigny de tenir Strasbourg à tout prix, mobilisant les forces françaises et des unités de la 1ère Armée.

Une défense héroïque malgré les défis
Dans les jours qui suivent, Strasbourg devient une ville-forteresse. Les FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) participent à l’effort de défense aux côtés des soldats réguliers. Les civils strasbourgeois, déjà éprouvés par la guerre, organisent des réseaux de soutien pour aider les soldats et préserver les infrastructures essentielles.
La bataille est rude. Du 5 au 15 janvier 1945, des bombardements intensifs frappent les communes périphériques. À Illkirch et Lingolsheim, les dégâts sont considérables. Mais les forces alliées parviennent à repousser les assauts allemands grâce à l’arrivée de renforts américains et français.
Un tournant pour Strasbourg et la France
Le 20 janvier 1945, l’offensive allemande est définitivement stoppée. Strasbourg reste sous contrôle français. Cette victoire, bien que coûteuse, est perçue comme un tournant symbolique et stratégique. Elle marque la fin des ambitions allemandes en Alsace et renforce l’unité nationale autour de Strasbourg.
Pour les Strasbourgeois, janvier 1945 reste gravé dans les mémoires. Loin d’être une simple bataille, cet épisode incarne le courage d’une ville, d’une région et d’un peuple qui refusèrent de plier face à l’adversité.
