Le mouvement régionaliste Unser Land a marqué, ce mardi 17 décembre 2024, le dixième anniversaire de la réforme territoriale qui a provoqué la disparition administrative de l’Alsace au profit de la région Grand Est. Une décennie après cette fusion imposée, les revendications pour la sortie de l’Alsace du Grand Est restent vives. Retour sur une mobilisation constante et les enjeux actuels.

17 décembre 2014 : une réforme imposée malgré l’opposition alsacienne

Le 17 décembre 2014, l’Assemblée nationale, alors dominée par une majorité socialiste, adoptait définitivement la réforme territoriale redéfinissant les contours des régions françaises. Cette loi controversée entraîna la disparition des entités administratives de l’Alsace, en les intégrant à la grande région Grand Est. Malgré une forte opposition des élus locaux et de la population alsacienne, la réforme est mise en œuvre au 1ᵉʳ janvier 2016.

À l’époque, de nombreux habitants avaient exprimé leur mécontentement face à ce qu’ils considéraient comme une « fusion forcée ». Le mouvement Unser Land, fervent défenseur de l’identité alsacienne, a été à l’avant-garde de cette mobilisation. Dix ans plus tard, son président, Jean-Georges Trouillet, ne décolère pas :
« L’Alsace a été violée en 2014 et elle ne l’a pas oublié. Depuis 2014, le peuple alsacien exprime la volonté claire et constante de sortir du Grand Est ».

Unser Land : un combat politique constant

Depuis 2014, Unser Land n’a cessé de réclamer la sortie de l’Alsace du Grand Est pour restaurer une collectivité à part entière. Les résultats électoraux témoignent d’une adhésion croissante à cette cause. À chaque scrutin local ou régional, les candidats de divers partis – du Rassemblement National aux centristes du MoDem, en passant par les soutiens des macronistes – se disent favorables à une sortie de l’Alsace du Grand Est.

Pour Jean-Georges Trouillet, cette unanimité affichée doit maintenant se traduire en actes :
« Le nouveau Premier ministre, François Bayrou, doit corriger les erreurs de la loi de 2014, il en a les moyens. Il est temps de passer aux actes et de mettre chacun face à ses responsabilités. »

Une demande soutenue par la population et les élus locaux

Les sondages récents montrent que la majorité des Alsaciens souhaite une sortie de la région Grand Est. Une enquête IFOP de 2022 révélait que 68 % des habitants du Bas-Rhin et du Haut-Rhin étaient favorables à un retour à une collectivité alsacienne autonome. Cette opinion se reflète également dans les positions des élus locaux.

Plusieurs maires, conseillers départementaux et députés ont pris position pour une Alsace autonome, soulignant des motifs identitaires, économiques et administratifs. Ils dénoncent notamment une dilution de l’Alsace dans la vaste région Grand Est, ainsi qu’un éloignement des centres de décision régionaux.

Les enjeux économiques et identitaires de la sortie du Grand Est

Pour ses défenseurs, la sortie de l’Alsace du Grand Est ne relève pas seulement d’une question identitaire, mais aussi économique. Les spécificités de l’Alsace, notamment sa proximité avec l’Allemagne et la Suisse, plaident en faveur d’une gestion autonome. Les détracteurs de la réforme pointent également une perte d’efficacité administrative due à l’éloignement de la région Grand Est, dont le siège se situe à Metz.

Unser Land plaide pour un modèle inspiré des régions voisines, comme la Sarre ou le Bade-Wurtemberg, qui bénéficient d’une autonomie renforcée au sein de leurs pays respectifs.

François Bayrou interpellé : des attentes fortes envers le gouvernement

L’arrivée de François Bayrou à Matignon est perçue comme une opportunité par Unser Land. Le Premier ministre centriste, qui a souvent défendu des formes de décentralisation, pourrait être tenté d’accéder aux demandes alsaciennes. Le mouvement demande une réforme permettant à l’Alsace de recouvrer une collectivité unique, à l’image de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) instaurée en 2021, mais avec des compétences élargies.

Cependant, aucun calendrier précis n’a été avancé, et les Alsaciens attendent des actes concrets.

L’avenir de l’Alsace : vers une autonomie retrouvée ?

Dix ans après la réforme territoriale de 2014, le débat sur l’avenir de l’Alsace reste d’actualité. La mobilisation populaire et politique ne faiblit pas, portée par un sentiment d’injustice largement partagé. Unser Land appelle désormais à une action politique déterminée pour corriger ce qu’il considère comme une erreur historique.

Jean-Georges Trouillet conclut avec une question adressée aux responsables politiques :
« Si la France ne se montre pas capable de répondre aux attentes de ses citoyens sur des sujets institutionnels comme l’Alsace, comment croire qu’elle sera capable de résoudre des problèmes beaucoup plus complexes, comme la dette ou la désindustrialisation ? »

La balle est désormais dans le camp du gouvernement.

Repères : La réforme territoriale en bref

  • 2014 : Adoption de la réforme territoriale sous François Hollande.
  • 2016 : Fusion des régions. L’Alsace disparaît pour intégrer le Grand Est.
  • 2021 : Création de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA), aux compétences limitées.
  • 2024 : Unser Land et une majorité d’Alsaciens réclament la sortie du Grand Est.