La Commission d’enquête publique a rendu un avis défavorable sur le projet de tram nord à Strasbourg, marquant un tournant inédit dans l’histoire des infrastructures de transport de la métropole alsacienne. Ce rejet, salué par une opposition unie, met en lumière les profondes divisions que ce projet a suscitées et questionne la stratégie municipale en matière de mobilités et de concertation citoyenne.
Un projet à 300 millions d’euros dans l’impasse
Le tram nord, porté par la municipalité écologiste, visait à désenclaver les communes situées au nord de Strasbourg, telles que Schiltigheim, tout en répondant aux enjeux de transition écologique. Avec un budget estimé à 300 millions d’euros pour seulement quelques kilomètres de voies, ce projet avait pour ambition de garantir l’équité territoriale, encourager le report modal, et réduire les nuisances liées au trafic automobile.
Pia Imbs, présidente de l’Eurométropole, a réagi avec prudence à cet avis défavorable, déclarant : « Nous prenons acte de cet avis, nous le respecterons. Le principe même de ce tram n’est pas remis en cause, nous allons remettre l’ouvrage sur le métier. » Une position qui reflète l’importance stratégique de ce projet pour les élus en place, malgré la désillusion palpable.

Une mobilisation inédite et un rejet unanime
L’avis négatif de la Commission fait écho à une opposition massive qui a rassemblé citoyens, associations et élus de tous bords. Pernelle Richardot, conseillère municipale et figure de l’opposition socialiste, n’a pas mâché ses mots : « Cet avis est aussi un camouflet pour une équipe municipale « messianique » qui pensait se passer du choix fait par les citoyens. » Cette critique acerbe met en lumière un reproche récurrent envers la majorité écologiste : celui d’une approche jugée dogmatique et déconnectée de la réalité du terrain.
Jean-Philippe Vetter, élu LR, a également fustigé la gestion du projet, évoquant un triple rejet inédit : par la Commission d’enquête, par les citoyens et par les élus d’opposition. Sur le réseau social X, il a dénoncé un manque de concertation et des choix imposés sans dialogue, estimant que « la municipalité écologiste recueille aujourd’hui les fruits de son dogmatisme ».
Un échec programmé selon certains observateurs
Les critiques à l’encontre du tram nord ne datent pas d’hier. Mathieu Cahn, ancien adjoint au maire, avait exprimé dès avril 2023 des doutes sur la viabilité du projet. Selon lui, la première réunion publique sur le sujet avait révélé une impréparation surprenante, avec une absence de plans de circulation concrets et des arguments d’autorité insuffisants pour répondre aux inquiétudes des habitants. « Sauver la planète, réduire la place de la voiture… Ce sont des impératifs nécessaires, mais cela ne permet en aucun cas de répondre aux interrogations quotidiennes concrètes », soulignait-il à l’époque.

Quels scénarios pour l’avenir ?
Malgré cet échec, les élus de l’Eurométropole ne semblent pas prêts à abandonner. Pia Imbs a affirmé vouloir travailler sur une nouvelle version du projet, tandis que Danielle Dambach, maire de Schiltigheim, a promis de trouver une solution alternative pour relier le nord de l’agglomération à Strasbourg.
Le rapport complet de la Commission d’enquête, attendu dans les prochains jours, sera déterminant pour comprendre les raisons de cet avis défavorable et envisager des pistes de révision. En attendant, cette déconvenue met en lumière l’importance d’une concertation approfondie et d’une prise en compte sincère des besoins des habitants dans les grands projets structurants.
Une leçon pour l’avenir des mobilités à Strasbourg
L’échec du tram nord est un signal d’alarme pour les décideurs locaux. Entre ambitions climatiques, contraintes budgétaires et attentes citoyennes, l’équation à résoudre reste complexe. Ce revers pourrait bien redéfinir les priorités et les méthodes de concertation dans la métropole, en espérant que l’avenir des mobilités strasbourgeoises puisse sortir grandi de cette crise.
